L'amitié


Elle le secoua vivement. Décidément, c'était peine perdue.. Cet idiot avait dû dormir encore à une heure pas possible ! Elle soupira avant de se retirer de la chambre. Quelques minutes après, elle réapparut avec un verre rempli d'eau, le sourire aux lèvres. Elle n'hésita pas une seconde et laissa couler le liquide froid sur le visage endormi de son frère. Celui-ci poussa un cri de stupéfaction et s'éveilla brusquement. Sa soeur le regarda, la mine réjouie.
-Raah ! Tu ne pouvais pas me réveiller plus tranquillement, soeurette ? se plaignit-il en bâillant paresseusement.
-Tss, impossible t'entendais rien du tout, répliqua-t-elle.
-Sérieux.. La prochaine fois, je te prépare le même coup.
-Bah voyons ! Essaye d'abord de te lever avant moi et je t'attendrais ensuite.
Il protesta en marmonnant faiblement. Bon sang, c'était déjà la rentrée ! Et dire qu'il n'avait fait que traîner ces vacances..
Pas le temps de rêvasser. Jason alla rapidement prendre sa douche, prépara ses affaires en hâte et s'installa à table pour déjeuner.
-Grouille-toi ou je pars sans toi, dit sa soeur d'un ton froid.
-Ouais, ouais.. T'occupe pas de moi, tu peux y aller avant.
Sa soeur était si casse-pieds lors des rentrées de classes. Pour elle, c'était le début du collège quant à lui, le lycée allait commencer.. Rien que d'y penser, il en avait déjà marre de la reprise. Heureusement, il allait dans un lycée avec son cousin du même âge. Au moins, il se sentirait moins seul face à tous les autres élèves qui lui étaient encore inconnus.
Après s'être préparé, lui et sa soeur s'en allèrent retrouver leur cousin qui les attendait dans la ruelle un peu plus loin.
-Vous êtres prêts, tous les deux ? leur demanda-t-il joyeusement.
-Oui, je ne tiens plus en place ! répondit Léa avec enthousiasme.
-Je ne suis pas plus emballé que ça moi.. fit Jason avec un air détaché.
-Allez, reprit son cousin en lui donnant une tape sur l'épaule, on s'amusera bien tous les deux !

Arrivés à l'école, il y eut tout d'abord l'appel qui dura une bonne vingtaine de minutes. Après quoi, les classes retrouvèrent leur professeur principal. Son cousin, Louis, était on ne plus sociable et s'était déjà trouvé quelques amis à force de bavarder de tous les côtés. Lui et ses nouveaux camarades se mettaient souvent à rire pendant les explications du professeur. Jason restait à part car il avait le caractère totalement opposé de celui de Louis : il n'aimait pas beaucoup parler et avait très peu d'amis sur qui compter. Pendant les récréations, il restait qu'avec Louis et si celui-ci était accompagné par ses amis, Jason s'éloignait sombrement : il n'appréciait guère la compagnie des autres élèves. C'est alors qu'un jour particulier se présenta. Il se trouvait seul avec Louis lorsqu'un autre camarade aborda Jason. Naturellement, Jason était incertain et était tenaillé par l'angoisse à l'idée qu'on individu veuille lui adresser la parole. Il répondit tant bien que mal et son cousin se moqua gentiment de lui. Le garçon s'adressa à lui et lui confia que pour lui aussi c'était difficile de se familiariser avec les autres :
-Tu sais, tout comme toi, j'ai du mal à m'adresser aux autres et je suis également très réservé. Mais si jamais parfois tu souhaites discuter de quoi que soit, tu peux venir me parler, au moins à moi, lui avait-il gentiment proposé.
-Oui.. c'est entendu, n'avait pu que répondre Jason, un peu sonné de voir quelqu'un qui voulait lui parler.
En vérité, Jason était heureux de rencontrer une personne dans son cas et il s'ouvrait plus facilement à celle-ci. Dès lors, le jeune homme l'initia aux jeux vidéos et à d'autres loisirs tout aussi amusants. C'est d'ailleurs grâce à lui que toutes les passions de Jason avaient pu naître.

Ils avaient adopté un quotidien qui leur convenait parfaitement. Tous deux se retrouvaient sur les réseaux sociaux à parler de jeux vidéos et autres pendant des heures. Jason suivait à la lettre les précieux conseils de son ami sur les séries à télécharger, les vidéos à visionner.. Jason avait tout à apprendre de lui. Le lendemain, ils débattaient sur les choses qu'ils avaient vues et Jason se renseignait sur le vocabulaire spécifique des jeux vidéos ou des séries. Il était totalement inculte et son meilleur ami –car c'est ce qu'il devint au fur et à mesure- lui rabâchait des choses qu'il trouvait inutile de préciser tellement cela lui semblait évident. A un moment, l'un et l'autre venaient à discuter de leurs attirances portées sur certaines filles de la classe. Jason, pour l'instant, n'éprouvait de l'amour envers aucune fille du lycée. Par contre, du côté de Martin , une fille s'intéressait énormément à lui mais Martin n'éprouvait pas la même chose et ne parvenait pas à lui faire comprendre, de peur de lui faire de la peine. Il demandait alors des conseils à Jason :
-Elle n'arrête pas de me fixer et de me harceler de messages. Elle m'a même envoyé des poèmes à plusieurs reprises, j'arrive pas à m'en débarrasser.. soupirait-t-il.
-Sérieux ? Et tu te plains ? Toi au moins, tu sais que tu plais à quelqu'un ! l'enviait Jason
-Non mais c'est vraiment embêtant, j'te le garantis ! se plaignait-t-il.
-Haha, je vois. Alors tu ferais mieux de vite lui dire qu'elle n'est pas ton genre, le conseillait-il.
-Je sais.. je sais que c'est ce que je dois faire.. Pourtant, je lui ai dit clairement que je ne voulais pas aller plus loin mais elle m'a répondu qu'avec le temps je m'habituerais. Elle est têtue et très déterminée, de ce que j'ai compris. Elle est complètement folle oui..
-Folle de toi, ouais ! le taquinait Jason
-Arrête, prends-le avec un peu plus de sérieux, Jason..
-Ok, ok.. Bah je maintiens que tu dois rapidement lui dire que toi et elle c'est impossible, soutenait-il.
-T'as raison, je ferais mieux de me bouger, achevait-il.
Une fois, la mère de Jason lui avait proposé d'inviter Martin à la maison, ce à quoi Jason s'empressa d'annoncer la nouvelle à son ami le jour même. Celui-ci lui avait communiqué sa réponse positive quelques minutes après, tout aussi enjoué que Jason. Ils avaient passé une soirée à jouer aux jeux vidéos du matin au soir. Léa, la soeur de Jason, s'entendait bien avec Martin et le remerciait même d'être son ami car elle désespérait de voir un jour son frère avec un ami. Jason s'emportait alors et Martin calmait le jeu en riant. Cette journée fut inoubliable pour chacun d'entre eux.
Un jour d'école, lorsque Louis demeurait seul, Jason s'approcha et voulut le remercier :
-Dis, Louis, je voulais te dire.. Hmm.. Eh bien merci pour tout, lâcha-t-il enfin.
Louis afficha alors une mine interrogative et demanda :
-Merci ? Mais pourquoi, qu'ai-je fait ? Ce n'est pas normal que tu viennes me remercier comme ça.. C'est si rare, d'habitude.. s'interrogea Louis.
-Oh arrête.. Tu me tapes sur les nerfs.. Je voulais te remercier puisque c'est grâce à toi que j'ai trouvé un ami, un très bon ami.
-Ah ? fit-il encore plus désorienté.
-Mais oui, Martin !
-Aaah, pas de quoi Jason ! Fallait bien qu'un jour tu te sortes les doigts du..
-Louis.. le coupa-t-il rageusement, un regard haineux dans les yeux.
-Je plaisante, tu le sais bien, s'empressa de rajouter Louis. En tout cas, je suis content que tu te sois fait un meilleur ami. Je pouvais pas toujours te guider, se moqua-t-il.
-C'est bien vrai, fit Jason en le bousculant avec un sourire aux lèvres.

Un petit bout de chemin et un nouvel ami


Aujourd’hui était finalement une journée tout à fait banale pour Lily . À 6h30 son réveille sonna, l’extirpant rapidement des bras de Morphée, elle aurait bien voulu y rester comme à chaque fois mais n’ayant pas le choix elle se leva, prit rapidement son petit déjeuné et sortit comme toujours en courant pour ne pas rater ses cours.

Il était 15h30 et tout se passait comme d’habitude, une fois sortie du lycée Lily resserra son manteau sur elle, on était en plein mois de novembre et l’aire se rafraîchissait rapidement. Arrivé a mis chemin elle entendit un bruit venant d’une ruelle adjacente à la rue principale. Sa fâcheuse curiosité la poussa à s’approcher et elle finit par voir un petit raton laveur fouillant les poubelles dans la cour arrière d’un restaurant. Lily s’approchant lentement de l’animal mais se figea qu’an elle vit un homme, surement le propriétaire, crier et chasser l’animal

-Tu m’énerves à toujours trainer ici sale bête ! Je vais te régler ton compte pour de bon !

Prononçant ces paroles l’homme se saisit d’une branche d’arbre morte gisant près du mur et l’abattit violemment sur le raton laveur qui eut à peine le temps de sauter et ne put esquiver le coup qui atterrit sur sa patte arrière droite.
Toujours figée de stupeur Lily ne put que regarder impuissante la petite bête fuir du mieux qu’elle pouvait, une petite trainée de sang se rependant sur son passage. Prise d’une impulsion elle suivit les traces s’enfonçant dans un petit bois de l’autre côté de la rue où elle finit par voir le pauvre animal assit contre un arbre, léchant sa blessure du mieux qu’il pouvait. Instinctivement et le cœur serré par ce spectacle la lycéenne s’approcha lentement de la petite bête jusqu’à s’agenouiller en face et fouilla dans ses poches pour ressortir un fin mouchoir et tendre les mains vers le raton. La réaction ne se fit pas attendre et la bête mordit le majeur de sa main gauche qui était plus proche infligeant une vilaine blessure à la fille. Pourtant elle ne s’arrêta pas et de sa main libre entreprit de nouer tant bien que mal en une seule main le mouchoir sur la patte baissée.

-Tu es coriace toi, ça ne me facilite pas la tâche tu sais...

Au bout d’une longue minute à batailler entre l'animal qui ne tient pas en place et la douleur qui se répandait dans sa main Lily finit par lâcher le raton laveur, satisfaite de son bandage de fortune mais un autre problème persistait, la bête ne semblait pas déterminée à la lâcher de sitôt la prise sur son doigt et bon Dieu de si petites quenottes faisaient un mal de chien ! Elle se mit à caresser son petit museau pour l’amadouer et après un petit moment le raton laveur ouvrit la gueule et libéra sa prise, marquée et commençante à saigner légèrement .
Lily se releva et sortit de son sac le reste de son déjeuner: un quart de burger restant et des frites et émietta le tout sous le regard plus qu’envieux de son compagnon qui cependant était trop méfiant pour s’approcher, une fois fini elle s’éloigna laissant la petite bête s’approcher doucement de la nourriture .

Et c’est ainsi qu’une routine s’installât : Lily n’attendait plus la fin des cours pour rentrer enfin chez elle mais aller mettre au raton laveur des restes de son déjeuner, au même endroit que la première fois ; d’abord le deuxième, puis troisième et quatrième jour . Le cinquième jour elle lui mit une part plus grande, comme pour le weekend elle ne passerait plus ici et partit avec en tête l’envie surprenante et presque bizarre de reprendre les cours au plus vite le lundi …

Pourtant le lundi rien ne se passa comme d’habitude… Lily courait presque avec un étrange sentiment d’inquiétude et arrive dans ce petit bout de bois qu’elle trouva finalement désert. Pas une seule trace du raton laveur qui généralement s’approchait à son arrivée...

-Il doit être parti quelque part… chasser une souris et il reviendra bientôt. Se dit Lily .

Mais après quinze minutes elle dut se rendre à l’évidence, elle ne pouvait pas attendre éternellement alors elle mit la nourriture a sa place habituel et reprit son chemin avec le cœur bien moins léger que d’habitude.

Ça faisait trois jours qu’elle passait dans le bois sans trouver aucune trace du raton laveur , chaque fois le mince espoir qu’elle avait s’envolait en fumé en découvrant la nourriture qu’elle avait placée presque intacte, quelques fourmis et petites bêtes ont dû passer par là, mais rien d’aussi gros qu’un raton laveur et en ce troisième jour elle hésitait à y aller et espérer encore en vain .
Ce fut finalement des bruits de pas et des cris qui attirèrent son attention alors qu’elle approchait en réfléchissant près de l’endroit où elle vit l’animal pour la première fois. Un homme qu’elle reconnut vite comme celui-ci ayant blessé le raton laveur s’approchait rapidement d’elle avec un visage pas du tout amical :

_Eh toi ! Lui cria-t-il . C’est toi qui mets de la bouffe dans les bois ? Je n'ai pas envie que ça attire des bêtes qui viennent fouiller dans mes poubelles à cause de toi sale gamine!

La première pensée de Lily fut de fuir le plus vite possible quand elle vit le visage de l’homme se tordre de douleur alors qu’un gémissement lui échappait .

-Que… ? Parvient à articuler l’homme .

Lily suivit son regardé qui descendait vers le sol et écarquillât les yeux en voyant...son petit raton laveur qui mordait sauvagement la jambe de l’homme ! Il jeta violemment l’animal qui atterrit contre un arbre et s’avança vers lui avec l’intention d’en finir. Ce qu’il n’avait pas prévu était la réaction de Lily qui se jeta sur lui et le fit s’étaler de tout son long sur le sol suivit de l’animal que se mit à lui griffer le visage avant d’être stoppé par Lily qui le porta et fuit aussi vite que possible.
Plus loin la fille s’arrêtât et reprit son souffle le raton laveur toujours dans ses bras :

-tu es revenu me sauver… merci tu es un véritable ami ! Il te faudrait un nom tu ne penses pas . Que dis-tu d'attend voir : Tanuki ! Bon ce n’est pas original j'avoue mais je n’ai vraiment pas d’idée, je pourrais te nommer ToufTouf à cause de ta touffe de cheveux sur la tête mais ça fera assez bizarre !Donc désormais on est ami !

Dans certains peuples d’Océanie les mots sont mystiques, ainsi parler trop est décrie : Des meilleurs amis n’a pas besoin de dialoguer pour être compris.
Ici, peu de gens comprennent cette philosophie mais j’ai un meilleur ami il s’agit mon voisin, bientôt « ancien voisin ». Il est plus grand que moi malgré une différence d’âge quasi inexistante, à des cheveux plus long longs et plus clairs, est plus musclé. Lorsque l’on se promène c’est lui qui se démarque. Il était aussi peu travailleur que moi mais a mieux réussi ses études puisqu’il va bientôt emménager seul loin de notre ville natale, après tout de nous deux c’est lui qui avait le plus soif de pouvoir.
Fini les matinées à emprunter le même chemin, fini les après-midi à écouter, l’oreille collée sur la fine cloison qui relie les chambres de nos maisons mitoyennes, fini les soirées en ville à boire jusqu’à la désinhibition totale, fini les nuits d’insomnie où il observait les étoiles depuis sa fenêtre et je l’observais en retour depuis la mienne…
Le soleil vient de se lever et je l’aide à transporter ses affaires dans la camionnette qu’il a loué pour l’occasion : une demande de ses parents qui doivent trouver pratique d’avoir un jeune homme pouvant les remplacer à leur guise. Mais ce n’est pas grave, je le connais par cœur, je sais déjà où me placer et à quel rythme avancer, quel rythme reculer et tout se déroule en moins de deux heures dans le silence le plus total.
Au moment de se retirer, il me salut d’un geste en ajoutant « merci heu… » soudainement plongé dans une recherche difficile, les yeux dans le vague. Je lui fais signe que ce n’est pas grave et rentre chez moi. Après tout cela fait huit ans que nous ne sommes pas parlés mais je le connais par cœur. C’est "mon" meilleur ami.